lundi 7 janvier 2008

Non, l'islam n'est pas "la deuxième religion de France"

Non, l'islam n'est pas "la deuxième religion de France"
Par René Marchand
Toutes les déficiences de la France face à l'islam qui a pris ses quartiers chez nous, tous nos reculs et nos échecs dans la guerre subversive que mènent contre nous ceux que nous nommons les islamistes, trouvent leur origine dans une mauvaise définition de l'islam, dont nous ne sommes jamais sortis depuis les temps de la colonisation. L'islam serait purement et simplement une " religion ", " la deuxième religion de France ". N'ayant jamais pris la peine de l'étudier, nous l'assimilons au christianisme contemporain. Nous en faisons une foi, qui ne concerne que la sphère privée de chaque personne, relève de la liberté individuelle, est hors du champ de la vie politique, un choix de conscience qui mérite le respect et, à ce titre, doit être protégé par la loi. Or, cette définition est fausse : la " religion " islamique déborde largement de la conscience individuelle ; l'islam a compétence dans le politique, le droit public, le droit privé… Il s'agit de quelque chose qui n'a pas d'équivalent en Occident : un ensemble insécable religion-droit-culture-civilisation-communauté-identité. Ecoutons l'actuel président du Conseil français du culte musulman, le recteur de la Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur (1) : "L'islam est à la fois une religion, une communauté, une loi et une civilisation. […] Ne sont pas seulement musulmans ceux qui pratiquent les cinq piliers de l'islam, mais tous ceux qui appartiennent à cet ensemble identitaire." Le recteur, qui se déclare partisan d'un islam modéré, respectueux des lois de la République, que tous nos ministres de l'Intérieur ont choisi pour être " la clef de voûte de l'islam à la française ", ne présente pas l'islam comme une religion de la sphère privée. Sa définition est exactement celle que pourrait donner un fondamentaliste, un intégriste, un islamiste et, dans cette ligne, il délimite les assujettis au Conseil qu'il préside exactement comme le feraient les pires ennemis de la démocratie, de la France, de l'Occident au sein du monde musulman. Il pose en principe l'existence en France d'une communauté dont l'identité, les valeurs de civilisation et la loi ne sont pas celles de la République. Il aurait pu ajouter que, selon la loi de cet ensemble, l'identité musulmane a prévalence sur toute autre appartenance : nation, famille, tribu, dynastie, parti…, qu'un musulman ne tient comme légitime que la loi musulmane et que, selon les écoles juridiques musulmanes, dont la sienne (le malikisme) n'est pas la moins rigoureuse, la renonciation à cet ensemble identité-religion-communauté-loi-civilisation (l'apostasie) doit être punie de mort. Il n'est donc pas étonnant que le Conseil français du culte musulman, élu par un peu plus de quatre mille individus, se soit immédiatement exprimé sans hésitation aucune au nom de six millions d'immigrés " d'origine musulmane ".. Il n'est pas surprenant non plus que le pouvoir ait été pris au sein du Conseil par les intégristes les plus sectaires, les Frères musulmans de l'UOIF. Avec sa définition de l'islam, le " modéré " leur ouvrait un boulevard, dans lequel ils se sont engouffrés. Mais Boubakeur pouvait-il donner une autre définition de l'islam ? L'islam est bien tel qu'il l'a défini. Il n'y a que des Français, ethnocentristes, ignorants et gogos, pour voir dans l'islam seulement une " religion ". L'ennui est que de tels Français sont au pouvoir, font les lois et les appliquent. A commencer par nos ministres de l'Intérieur.Nicolas Sarkozy ne s'est-il pas vanté d'avoir nommé un préfet d'origine musulmane ? Il a cru peut-être qu'il distinguait un homme en fonction de sa foi - ce qui, déjà, était contraire aux principes et aux traditions de la République (La France n'est ni le Liban ni l'Empire austro-hongrois). En réalité, il affectait à un poste de haute responsabilité dans la République un homme en raison de son appartenance à une communauté, qui a une identité et une loi, différentes de celles de la République, qui a vocation à intervenir en tout domaine : religieux, mais aussi politique, privé ou public, en fonction de ses codes et valeurs propres. Comment pourrions-nous avoir une politique pertinente à l'égard des " musulmans d'origine " présents en France ainsi que vis-à-vis des pays musulmans dans le monde si nous pensons et agissons à partir d'une vision erronée de l'islam ? En réduisant l'islam à une religion selon nos définitions : une foi de la sphère privée, en en niant les dimensions identitaires, communautaires, politiques, juridiques…, nous nous condamnons à perdre les combats que nos adversaires parmi les musulmans ont déjà engagés ou engageront demain sur les terrains de l'islam que nous refusons de prendre en compte. (1) Le Figaro Magazine. Samedi 29 juin 2002.
René Marchand

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