mardi 21 avril 2009

Durban2 dénonce les esclavagistes... s'ils sont blancs

Par Tidiane N’Diaye, écrivain et anthropologue.

L'esclavage n'est pas une invention occidentale : les puissances arabo-musulmanes organisaient elles-aussi l'esclavage... Mais pas question d'en dire un mot à la réunion de Durban2, qui vient de s'ouvrir à Genève.


L’édition précédente de la « conférence fourre-tout » contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui s’est tenue à Durban (Afrique du Sud), du 31 août au 8 septembre 2001, fut un échec. Si pour la première fois, la communauté internationale a reconnu que la traite des Noirs par les Européens avait été « une tragédie dans l’histoire de l’humanité » et qu’elle constituait « un crime contre l’humanité», pas un mot sur l’antériorité de celle pratiquée par les Arabo-musulmans et ses conséquences, notamment la situation des rares minorités noires ayant survécu dans les pays arabes. A Durban – dans une sorte de «syndrome de Stockolm à l’africaine» -, les représentants du continent noir et ceux des pays arabes se sont contentés de mettre en accusation les négriers occidentaux, avec demande de repentance et de réparation.


Le commerce négrier plus horrible encore que la traite transatlantique

Pourtant, bien qu’il n’existe pas de degrés dans l’horreur ni de monopole de la cruauté, l’on peut soutenir sans risques de se tromper, que le commerce négrier et les expéditions guerrières provoquées par les Arabo-musulmans, furent pour l’Afrique noire et tout au long des siècles, bien plus dévastateurs que la traite transatlantique. Par exemple, la seule guerre sainte menée par un chef arabe soudanais, mystique, illuminé et qui se qualifiat lui-même Mahdi (descendant du Prophète), tout le Soudan depuis l’Océan jusqu’en Égypte englobant tous les plateaux de l’Afrique - du Nil jusqu’au Zambèze -, était livré aux chasses à l’homme et à la vente de captifs. Cet espace immense deux fois grand comme l’Europe, certains explorateurs évaluaient sa population au XIXème siècle, à environ cent millions d’âmes. Pour avoir une idée du mal, il faut savoir que ces mêmes observateurs, avaient constaté que pour chasser et enlever de force cinq cent mille individus, il fallait en faire périr près de deux millions d’autres (résistants ou fuyards).


Le colonialisme a mis fin à l'esclavage

Ainsi si les naissances avaient cessé à l’époque, en moins d’un demi-siècle, les régions de l’intérieur de l’Afrique ne seraient plus de nos jours, qu’une solitude désolée. Les dérives asservissantes et racistes du colonialisme sont connues et largement dénoncées depuis par nombre d’Occidentaux eux-mêmes. Cependant l’on ne peut résumer la présence européenne en Afrique, uniquement à des pratiques «racialistes» et une succession de crimes contre l’humanité. La démarche historique ne s'en trouverait pas éclairée. Car l’on ne saurait ignorer, que ce fut la colonisation européenne, qui mit entièrement fin à la traite arabo-musulmane. L’Europe devenue anti-esclavagiste, ses puissances ont aboli cette ignominie. En outre, la plupart des nations occidentales impliquées dans le commerce triangulaire, ont aujourd’hui reconnu leur responsabilité et prononcé leur aggiornamento, pendant qu’on attend toujours celui des pays arabo-musulmans (Moyen-Orient, Maghreb, Iran, Turquie etc.).


17 millions d'Africains persécutés

L’on pouvait cependant espérer, que les résolutions adoptées à Durban iraient dans ce sens. Mais dans l’esprit, l’acte aussi solennel fut-il, n’était qu’une entreprise fallacieusement orientée, doublée d’une dénonciation sélective. Durban n’a pas donné une vision d’ensemble honnête et objective de la terrible «tragédie noire» passée. Puisque de nos jours encore, beaucoup associent par réflexe, traite négrière au seul trafic transatlantique organisé à partir de l’Europe, des Amériques et qui a conduit à la mort ou à la déportation de millions d’Africains dans le Nouveau Monde. Alors que la traite et le travail forcé des peuples noirs, n’ont pas été une invention des nations européennes. Les Arabo-musulmans sont bien à l’origine de cette calamité et l’ont pratiquée en grand, du VIIème au XVIème siècle, pendant près de mille ans, en déportant près de 10 millions d’Africains, avant l’entrée en scène des Européens. Au total, les Arabo-musulmans auront tué, castré ou déporté près de 17 millions d’Africains.



Au cours de ce douloureux chapitre de l’histoire de l’humanité, qu’il est difficile de ne pas qualifier de génocide de peuples noirs par massacres, razzias sanglantes puis castration massive, chose curieuse, très nombreux sont ceux qui souhaiteraient le voir recouvert à jamais du voile de l’oubli, souvent au nom d’une certaine solidarité religieuse, voire idéologique. C’est en fait un pacte virtuel scellé entre les descendants des victimes et ceux des bourreaux, qui aboutit à ce déni. Un silence sélectif entourant le crime arabo-musulman envers les peuples noirs, planait à Durban où on s’est contenté de mettre en accusation les négriers occidentaux, avec demande de repentance et de réparation.


Les participants ont tout simplement réussi, à occulter le rôle et la responsabilité des nations arabo-musulmanes, dans le martyr des peuples noirs, pendant plus de treize siècles sans interruption. Et dans un mélange des genres hors-sujet, on y a même entendu parler de « crimes sionistes » et comble des paradoxes, de solidarité avec les Palestiniens pourtant descendants de peuples acteurs de la traite négrière arabo-musulmane. C’est entre autres, ce qui a perverti l’esprit de cette rencontre, où devaient être étalées, toutes les vérités, responsabilités et complicités sur les traites négrières et toutes les formes de racisme et d’antisémitisme. Il est cette fois à espérer que cette fois, Genève puisse intégrer - comme la mémoire humaine -, que les horreurs de l’histoire, quels que soient leurs auteurs, ne doivent jamais tomber dans l’oubli.

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