Les faits rapportés dans ces pages ne sont pas des révélations. Nul ne peut en contester l'authenticité. Et pourtant, il existe aujourd'hui une tendance à les ignorer, comme n'ayant plus de valeur politique. Cette tendance est regrettable, parce que les données que nous présentons ici conduisent à des conclusions encore valables et toujours en action dans la politique des peuples arabes. Ces peuples sont devenus membres des Nations Unies, avec tous les droits afférents à cette qualité. Ils font entendre leur voix dans toutes les délibérations internationales. Il faut donc connaître et tenir compte de leurs credo politiques et sociaux en vue d'établir l'ordre, la paix et la démocratie dans le monde. On sait avec plus ou moins de détails que les Arabes du Proche et Moyen-Orient ont collaboré avec l'Axe pendant la guerre. Cependant, pour des raisons multiples, la plupart des actions diplomatiques concernant le Proche-Orient ne tiennent pas compte de cette période- « regrettable •>, de sorte que les officiels arabes ont put s'imaginer que l'activité de leurs peuples en faveur des nazis est oubliée. Bien plus, ils réclament des récompenses pour la prétendue aide qu'ils auraient fournie aux démocraties ! Devant cette étonnante déformation des faits historiques, nous croyons avoir l'impérieux devoir de publier des documents sur l'effort de guerre des Arabes, qui ne parviendraient pas autrement sous les yeux du public. On ne peut nier (et tous les observateurs s'accordent sur ce point) qu'avant la guerre, les Arabes du Proche-Orient éprouvaient une vive sympathie pour les pays de l'Axe, et une hostilité non déguisée à l'égard des Britanniques. Ces sentiments imprégnaient, la grande masse des peuples arabes, pendant que les chefs collaboraient souvent ouvertement avec l'Axe. Les idéologies fascistes et nazies suscitaient un écho direct et facile dans le monde arabe; elles s'adaptaient à des formes de pensées parallèles, toutes prêtes à les accueillir; elles trouvaient des cadres matériels tout faits dans les clubs politiques existants. Cette prédisposition au fascisme était favorisée dès avant Munich, par la politique d'« apaisement » pratiquée par les Britanniques dans le Proche-Orient. Les Britanniques croyaient qu'il fallait se concilier à tout prix les éléments hostiles, c'est-à-dire les extrémistes arabes, et qu'on pouvait se permettre de ne pas tenir compte des modérés, puisque ceux-ci ne menaçaient pas les intérêts britanniques. Parmi ces modérés,'il y avait de véritables démocrates, comme le Dr. Shahbandar, de Damas. Ainsi, l'argent dépensé par les Britanniques pour se concilier la faveur des Arabes vint surtout dans les poches de quelques leaders extrémistes, pour la plupart fascistes. On gaspillait des sommes énormes au lieu de gagner les masses par l'amélioration des conditions sanitaires, de l'éducation, du bâtiment, on fortifiait au contraire le crédit des chefs extrémistes, on accréditait leur « infaillibilité » en cherchant à s'insinuer dans leurs bonne grâces. Après le début de la guerre, les promesses de la propagande et les succès militaires allemands firent une impression profonde sur les masses arabes, sans maturité politique. Les Arabes restèrent longtemps convaincus de la victoire finale de l'Axe. Les Britanniques accueillirent favorablement certaines revendications politiques arabes légitimes. On y vit de la faiblesse. Par contre, la brutalité nazie dénoncée par la propagande alliée frappa les musulmans comme le signe éclatant de la puissance allemande et leur persuada qu'il était sage de se ranger aux côtés du vainqueur. Les quelques rares leaders arabes favorables aux Anglais durent taire leurs opinions et se donner pour anti-britanniques, afin de garder la confiance de leurs troupes. Les sentiments du monde arabe pendant la guerre sont mis on évidence dans les lignes suivantes écrites par un anglais compétent en la matière, Glubb Pasha, commandant de la « Légion Arabe de Transjordanie ». Voici, ce qu'il écrit sur la révolte d'Irak de 1943 : « Les Anglais ont toujours su qu'ils gagneraient la guerre ; mais à cette époque, chaque Arabe était profondément convaincu que c'en était fait de la Grande-Bretagne pour toujours, et que l'occupation des pays arabes par les Allemands n'était plus qu'une question de semaines. Si les Irakiens n'avaient été parfaitement sûrs de leur fait, ils ne nous auraient pas déclaré la guerre... En un mot, pendant le mois qui précéda la prise de Baghdad, chaque Arabe savait que nous étions perdus. Toutes les troupes arabes que nous avions organisées se sont mutinées, ont refusé de combattre pour nous, ou, plus simplement, ont déserté. Seuls les hommes de la Légion Arabe nous sont demeurés fidèles. Ils ont même joué un rôle- actif, énergique, appréciable dans notre petite campagne » (1) En février 1945, lorsque la guerre approchait de sa fin, et que l'issue n'en faisait plus de doute, l'Égypte, l'Arabie Séoudite, la Syrie et le Liban déclarèrent la guerre à l'Allemagne. Les déclarations de guerre de la 11e heure demeurèrent lettre morte : aucun de ces États ne prit une part directe aux opérations militaires. Ces actions, toutes platoniques, étaient destinées de toute évidence à donner à ces pays des sièges à l'ONU où seules pouvaient participer les nations ayant déclaré la guerre à l'Axe avant le 1 mars 1945. Un seul pays arabe déclara la guerre à l'Allemagne des 1939 : la TransJordanie.
(1) Appendice du «Golden Carpet » de Somerset D. Chair. Harcourt, Brace et Gie. New-York 1945, page 243
Ce pays n'était pas encore indépendant. Sous mandat britannique il se trouvait tributaire (et l'est toujours) des crédits britanniques dont dépendait entièrement son armée, la Légion-arabe. L'Irak déclara la guerre à l'Allemagne en 1943, quand EI-AIamein eut renversé la balance en faveur des Alliés. Cette déclaration de guerre devait atténuer la signification du coup de poignard dans le dos, que l'Irak avait donné aux Anglais en 1941. L'attitude générale des États arabes n'était que la suite logique des relations qui existaient de longue date entre certains milieux arabes et l'Axe. Avant la guerre, de nombreux étudiants arabes avaient visité l'Allemagne et l'Italie. Des politiciens allemands étaient venus dans le Proche-Orient, l'argent allemand et italien avait afflué en même temps que les journaux de propagande. Les radios de l'Axe faisaient preuve d'une sollicitude particulière pour leurs auditeurs de langue arabe. En ce qui concerne la Palestine, on sait maintenant que les troubles de 1936-39 avaient été fomentés et financés par l'Axe. Le Mufti de Jérusalem était en contact avec Mussolini depuis des années, par l'intermédiaire de son agent à Genève, l'Emir Shekib Arslan. On a pu intercepter une partie de leur correspondance secrète. Des journaux arabes opposés au Mufti en ont publié, des extraits dès 1935. Certains groupes de leaders syriens étaient en relations continues avec l'Axe depuis longtemps:. II existait avant guerre plusieurs organisations nazies arabes : les Chemises de Fer (dirigées par Fakhri Al-Barudi, du Bloc National, membre de l'actuel Parlement syrien) ; la Ligue pour l'Action Nationale (dirigée par Abu al-Huda al-Yafi, le Dr. Zaki al-.Iabi et d'autres) ; le Club An-Nadi al Arabi à Damas (dirigé par le Dr. Said Abd al-Fattah al-ïindn).
http://aval31.free.fr/efforara/web/liensnazis.html
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