article paru en septembre 1981
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1. — Tout d'abord on ne peut tirer aucun argument des statistiques de l'époque ottomane et même de l'entre-deux-guerres : elles sont totalement fantaisistes. Pour la même année, les sources ottomanes varient de 300 à 650 000 habitants pour la Palestine, de 20 à 60 000 habitants pour Jérusalem. Allez donc faire des pourcentages de Juifs et d'Arabes là-dessus. A cela s'ajoute le fait de la grande quantité de nomades (bédouins) impossible à dénombrer. Mais ce que l'on sait, c'est qu'entre les deux guerres, s'il y a eu arrivée des Juifs dont on parle toujours, Il y a eu aussi une entrée massive d'Arabes en Palestine sous mandat britannique.
2. — Les Palestiniens n'existaient pas en tant que groupe significatif, ethnique, culturel. Ils n'ont rien de commun avec des peuples comme les Kurdes, les Turcs, les Druzes, les Maronites qui sont une entité spécifique. Les Palestiniens étaient simplement des Arabes habitant en Palestine, et qui auraient pu, sans mal, habiter ailleurs, en Jordanie, en Syrie ou en... Arabie.(...)
3. — « Il est évident que la Palestine appartient en droit comme en fait aux Arabes ».
On croit rêver (il est vrai que dans « Le Monde » on a pu lire que les Palestiniens descendaient en droite ligne des Philistins, antérieurs aux Hébreux !) Car enfin comment les Arabes sont-ils venus en Palestine ? Ils sont tombés du ciel comme de bons anges ? En réalité ils se sont installés là par la guerre, la conquête, la violence, le massacre. Jusqu'à eux et que ce soit sous les Grecs, sous les Romains ou sous Byzance, la Palestine était d'abord peuplée de Juifs. Les Juifs ont été chassés par les Arabes. En face de cela les Juifs y sont revenus avec mandat international, rachat de terres, etc. Et, entre temps, la Palestine avait été sous des dominations multiples, française, ottomane, égyptienne, etc. Et il ne faut pas oublier que les Turcs ne sont pas des Arabes ! Il n'y a rien « d'évident » quant à la propriété des Arabes sur cette terre.
4. — Quoique cela soit très désagréable, et parmi les choses qu'il ne convient pas de dire, il faut rappeler que les Arabes de Palestine sous la haute direction du Grand Muphti de Jérusalem ont été des alliés décidés des nazis, ont reconnu le régime hitlérien et ont combattu les armées des nations antifascistes. On a admis que les peuples alliés aux nazis devaient être « punis... » mais il ne fallait pas, bien sûr, toucher aux Palestiniens !
5. — Jérusalem ville sainte... de tout le monde ! Il ne faut pas exagérer. Pour les Arabes elle est aussi, et accessoirement une ville sainte, bien après La Mecque et Médine. Pour les protestants, il n'y a pas de ville sainte ; pour les catholiques c'est d'abord Rome et secondairement Jérusalem. Il n'y a que pour les Juifs qu'elle soit une ville sainte, unique et absolue. L'histoire de « Jérusalem, ville sainte indispensable aux musulmans » est un pur argument ad hoc polémique.
6. — Enfin je voudrais rappeler comment la ville sainte fut traitée par les Arabes quand elle était sous domination jordanienne. Non seulement les Juifs de Jérusalem furent progressivement exclus de leur quartier où il était interdit de reconstruire les maisons juives en mauvais état. Mais entre cent autres, deux faits : il y a à l'est de Jérusalem le cimetière juif, le plus sacré de tous. Les Arabes en ont arraché les pierres tombales et ont construit avec des cabinets publics (je l'ai vu). Il y a un lieu où se situe la « Tombe du Jardin », où des fouilles archéologiques avaient découvert une tombe qui pourrait être le plus vraisemblable des sépulcres de Jésus. Les Arabes ont largement entamé ce lieu pour y construire une station d'autobus. Et finalement je ne cesserai jamais de dire que si les Palestiniens ont été très malheureux en tant qu'expulsés et personnes déplacées, ils partagent le sort de dizaines de millions ; y compris les Français d'Algérie.
Pourquoi seuls les Palestiniens provoquent-ils une telle passion, un tel amour, pourquoi sont-ils seuls comptés comme des « pauvres », des déshérités... ? Ce n'est pas la justice qui anime ces discours, mais la haine du Juif.
Jacques ELLUL
Écrivain, Professeur de droit à l'Université de Bordeaux
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