mardi 9 août 2011

Mouahaha: Quand Tottenham était un modèle pour les banlieues françaises

Presse et politiques tentent de comprendre les raisons profondes des émeutes qui embrasent le quartier nord de Londres.

Tottenham, modèle à suivre ? Le 16 novembre 2005, en pleine émeutes des banlieues en France, un groupe de jeunes étudiants d'Evry (Essonne), destinés à travailler dans les banlieues parisiennes, font un voyage pour s'inspirer de l'exemple de Tottenham, quartier de Londres « où 39 nationalités se côtoient » et où, après des années chaudes, le calme semble être revenu.

Régulièrement secoué par des émeutes dans les années 70 et 80, Tottenham, en 2005, est présenté comme un quartier où, malgré les difficultés – le taux de chômage des jeunes y est élevé –, l'intégration fonctionne.

Six ans après, c'est à nouveau l'explosion. Suite à la mort d'un jeune homme tué lors d'un échange de tirs avec la police jeudi 4 août, une marche silencieuse a été organisée, suivie des désormais traditionnelles émeutes qui accompagnent ces drames.

Depuis samedi soir, le nord de la capitale connaît des troubles graves, désormais étendus à d'autres quartiers de Londres, dont Enfield, Islington, Brixton (sud) et Oxford Circus. Plus de cent personnes ont été arrêtées, des manifestants et des policiers ont été blessés.

Ces agitations rappellent celles des années 80, quand les grandes villes britanniques s'embrasaient régulièrement. Saint Pauls, Brixton, Handsworth. Les pires à Toxteth, un quartier de Liverpool et à Tottenham (...)

http://www.rue89.com/2011/08/08/quand-tottenham-etait-un-modele-pour-les-banlieues-francaises-217141

-----------

Lors des émeutes de ce week-end à Londres, les médias sociaux ont été logiquement très actifs. De multiples vidéos ont été postées sur YouTube et les manifestants n'ont pas hésité à se prendre en photos devant leurs butins ou des vitrines saccagées. Des journaux comme le Daily Mail estiment même que les médias sociaux ont contribué à attiser les violences. Scotland Yard a également déclaré lundi après-midi que ceux qui avaient encouragé les manifestants sur Twitter ne resteraient pas «impunis».

Sauf qu'il semble que l'outil le plus utilisé par les émeutiers pour s'organiser ait était le BlackBerry Messenger qui permet de discuter en instantané. Selon l'autorité de régulation des médias Ofcom, les téléphones de la marque canadienne sont en effet les préférés des adolescents britanniques, 37% en possédent un. Le Guardian considère que «BBM a supplanté les textos car c'est gratuit, instantané et permet de toucher une communauté plus importante. Et, au contraire de Facebook et Twitter, la plupart des messages BBM ne sont pas traçables par les autorités».

L'un des messages diffusés massivement dimanche a ainsi appelé à vandaliser les magasins d'Oxford Street: «Que tout le monde de tous les coins de Londres se rassemble dans le coeur de Londres (centre) OXFORD CIRCUS. Les magasins vont être dévastés donc ramenez-vous pour choper des trucs (gratos). Que les flics aillent se faire foutre, allons les dégager avec notre émeute ! >:O C'est une guerre raciale là donc si vous voyez un frère... SALUEZ-LE ! Si vous voyez un flic... TIREZ !»

(...)

http://www.liberation.fr/monde/01012353266-pour-les-emeutiers-londoniens-bbm-est-plus-efficace-que-facebook-ou-twitter

---------




http://www.telegraph.co.uk/news/uknews/crime/8687177/London-riots-live.html

------------

Quand le Guardian donnait de gdes leçons à la France en 2005:

(...)

Then comes the more fundamental issue of social conditions. As Le Monde again has noted: "In full view of everyone, a country which regards itself as the birthplace of human rights and the sanctuary of a generous social model is proving to be unable to ensure decent living conditions for young French people." The conditions under which young people from ethnic minorities are living in France are as bad, if not worse than those that black people suffered in Detroit in the 1960s and Brixton in the 1980s. Unemployment is reported to be up to five times as high as the 10% national average. They are housed in grim, run-down, graffiti-ridden, tower blocks which stretch for miles. Paradoxically, Mr Sarkozy has spoken of the need to open up new opportunities for ethnic minorities using US-style affirmative action programmes, but failed to find political support even from parties on the left.

Finally, France will need to look again at its uncompromising policy on assimilation. It has never had any time for Britain's multi-cultural approach. Indeed, as our French correspondent reports today, it is illegal in France to gather or hold any statistics on ethnicity or religion. Yet without these, little progress can be made on affirmative programmes. British policy on community cohesion - preserving and celebrating our diverse cultural backgrounds - has been taking a battering in the wake of recent inter-ethnic riots in Birmingham. But what has been happening in France, reinforces the correctness of our current goals. Meanwhile the best political message has been from banners held by residents of Clichy-sous-Bois: "No to violence" and "Yes to dialogue".

http://www.guardian.co.uk/world/2005/nov/08/france.mainsection1

--------------------------

Les policiers français font la leçon à leurs collègues britanniques
| 11.08.11 | LE MONDE


La police en Grande-Bretagne ne dispose pas de forces de l'ordre spécifiquement destinées à la lutte contre des phénomènes de guérilla urbaine ou des manifestations à risque.

Reconnue, depuis les événements de mai 1968, pour son savoir-faire en matière de maintien de l'ordre en milieu urbain, la France a transmis aux Britanniques, par l'intermédiaire du cabinet du ministre de l'intérieur, Claude Guéant, une offre d'expertise pour aider à contenir les émeutiers.

La proposition ne manque pas d'ironie au regard de l'histoire récente qui avait vu une partie de la presse britannique railler des autorités françaises incapables de faire face à l'embrasement des banlieues en novembre 2005.

Néanmoins, selon deux responsables policiers français joints, mercredi 10 août, à Paris, par Le Monde, cette proposition d'"échange d'expérience" ne vise en rien à froisser leurs homologues britanniques, mais s'appuie sur un constat factuel.

La police en Grande-Bretagne ne dispose pas de forces de l'ordre spécifiquement destinées à la lutte contre des phénomènes de guérilla urbaine ou des manifestations à risque. Il n'existerait pas dans ce pays l'équivalent des compagnies républicaines de sécurité (CRS) ou de l'escadron de gendarmerie mobile.

En cas de menace, les autorités équipent des policiers classiques, les bobbies, avec casque et matraque, et leur font jouer un rôle qui n'est pas le leur en temps normal. Résultat : souvent mal équipés, d'après les experts français, ils ne savent pas "évoluer en bloc" et manœuvrer "de façon tactique".

Ils commettraient par ailleurs des fautes techniques préjudiciables à leur propre sécurité. "Dans les manifestations, détaille un officier de police parisien, ils laissent les gens se promener de part et d'autre du cordon de sécurité, ils laissent des voitures se glisser dans les cortèges, ils ne scellent pas les barrières de protection ensemble ce qui en fait des projectiles dangereux pour les manifestants quand les choses dérapent."

DIFFÉRENCES DE SAVOIR-FAIRE

De plus, ne disposant que de très peu d'effectifs en réserve, si un événement requiert un grand nombre de membres de forces de l'ordre, les chefs de la police doivent faire appel à des renforts d'autres régions. Or, à l'exception d'un corps national de 4 000 fonctionnaires essentiellement concentrés sur des tâches administratives, les policiers dépendent de leur comté.

Donc, pour renforcer Londres, il a fallu dépeupler les services d'autres régions. Mais si d'aventure ces secteurs sont eux-mêmes le lieu de troubles, comment gérer des allers-retours ?

Cette improvisation, cette absence de culture du maintien de l'ordre et de sens de la manœuvre en milieu urbain auraient facilité, selon les deux policiers français sollicités par Le Monde, les exactions des pilleurs, qui ont mis à sac les rues de Londres depuis le 6 août.

La polémique sur l'utilisation des canons à eau ne paraît pas pertinente aux yeux de ces spécialistes français du maintien de l'ordre. "Ces engins sont utiles lorsqu'il s'agit d'affrontements en ligne, explique l'un d'eux, mais là, ce sont des équipes très mobiles qui se savent surveillées par les caméras. Qui voulez-vous arroser ?"

De même, la référence au savoir-faire britannique en Irlande du Nord ne paraît pas nécessairement adéquate, d'après ces experts français. "Cela n'a rien à voir. Là-bas, le périmètre d'intervention était beaucoup plus réduit et surtout les émeutiers ciblent les flics, pas les magasins."

Contactée mercredi, l'ambassade de Grande-Bretagne à Paris a admis qu'il existait une différence en matière de maintien de l'ordre entre les deux pays. "Chez nous, le dialogue avec les communautés a longtemps permis de désamorcer les affrontements durs." MOUAHAHAHA

---------

Emeutes au Royaume-Uni: un goût de cendres

(...)

Les émeutes urbaines laissent la classe politique désemparée. Censé organiser le "vivre ensemble", le modèle multiculturel britannique a engendré de nouvelles formes de racisme. Et une partie de la jeunesse, à la dérive, n'a d'autre horizon que la culture de la violence.

(...)

Cette flambée de violence laisse néanmoins ouverte la question délicate de l'intégration de populations issues de l'immigration et du fragile équilibre entre communautés. Certes, à Manchester, ce sont des jeunes de toutes origines qui ont attaqué le centre-ville. Mais au départ, à Londres, même si les médias et la police ont pris soin de ne pas le souligner, il s'agissait bien d'une émeute ethnique. La mort, dans des circonstances qui restent à élucider, d'un jeune Anglo-Caribéen, Mark Duggan, poursuivi par la police, et les rumeurs qui se sont ensuivies ont enflammé des jeunes Antillais. Lesquels ont attaqué la police et pillé des commerces. Au tribunal de Westminster, quelques jours plus tard, le défilé des personnes interpellées confirmait la large appartenance des fauteurs de trouble à cette communauté.

Plus inquiétant encore, les témoignages égrenés par les médias ont laissé apparaître le racisme des casseurs. Ici, un jeune homme blond humilié et dépouillé de ses vêtements par un trio de jeunes Caribéens ; là, un étudiant malaisien à la mâchoire brisée. A Hackney, une grand-mère antillaise de 45 ans, Pauline Pearce, s'est interposée avec sa canne alors que des émeutiers tabassaient un passant qui avait eu la mauvaise idée de prendre des photos sur son téléphone portable. "Vous êtes en train d'en faire un affrontement entre Noirs et Blancs !" leur a-t-elle hurlé. "Mais c'est ce que nous voulons !" ont-ils répondu. "Effondrée", la quadragénaire dit "ne plus comprendre les jeunes d'aujourd'hui".

A Birmingham, la mort de trois jeunes Pakistanais, délibérément fauchés par un jeune Noir en voiture alors qu'ils voulaient défendre une station-service prise pour cible, a suscité un début de panique. Dans cette même ville, il y a six ans, des batailles de rue avaient opposé, quarante-huit heures durant, les communautés ethniques. Une rumeur - infondée - s'était répandue sur le viol d'une jeune fille noire par des Pakistanais. Cette fois, il a fallu que le père d'une des victimes, Tariq Jahan, devant les caméras de télévision, appelle au calme et exhorte les Pakistanais à "rentrer chez eux", alors que certains criaient vengeance. "Noirs, Blancs, Asiatiques, nous vivons tous ensemble dans la même communauté", a-t-il plaidé. Sur Dudley Road, devant la station d'essence, théâtre du drame, des fleurs s'amoncellent sous une bannière où l'on peut lire : "Haroon, Shazad, Abdul : assassinés pour avoir protégé notre communauté." Vice-président du centre afro-caribéen de la ville, Alton Burnett a présenté les regrets de sa communauté avant de rejeter la responsabilité du drame sur... le gouvernement Cameron.

Multiculturalisme d'Etat

"Si la police a tardé à réagir, juge Douglas Murray, analyste à la Henry Jackson Society, c'est à cause du poids du politiquement correct. Accusée à tout bout de champ de racisme institutionnalisé et de brutalité, elle n'ose plus intervenir face aux délinquants, a fortiori lorsqu'ils sont noirs." En février dernier, dans un discours remarqué prononcé à Munich, David Cameron avait estimé que, "avec la doctrine du multiculturalisme d'Etat, nous avons encouragé différentes cultures à vivre séparées les unes des autres et en marge du courant majoritaire". Le climat de tension ethnique de la semaine dernière lui aura donné raison.

Mais le multiculturalisme, cette vision d'une société qui s'ordonnerait sur des lignes de partage tracées selon le critère communautaire et que reflète la géographie londonienne, pourrait bien, toutefois, sortir renforcé des derniers événements. Au début des troubles, dans la capitale britannique, face à une police anglaise surprise et, dans un premier temps en tout cas, inerte, chaque communauté se réfugiait naturellement dans un réflexe d'autodéfense. A l'ouest, à Southall, 700 à 800 sikhs, enturbannés, armés de sabres et de battes de cricket, passaient la nuit dehors afin de protéger leurs temples et leurs biens. A Dalston, au nord-est, c'étaient les commerçants turcs qui chassaient les pilleurs. A Whitechapel, les Bengalis...

Des jeunes coupés des codes sociaux collectifs

L'ordre est revenu. Mais pour combien de temps ? Les violences de la rue ont imposé cette brutale évidence : un pan de la jeunesse anglaise, issue de l'immigration caribéenne, est à la dérive, coupé des codes sociaux collectifs. "Dès que la police a réoccupé le terrain, tout a cessé, commente la chercheuse en criminologie Caroline Bracken au think tank Civitas. Cela prouve que ces pillages étaient dictés davantage par l'opportunisme que par un motif politique." C'est également ainsi que le leader de l'opposition, le travailliste Ed Miliband, l'a compris : il a condamné le "comportement criminel des individus" impliqués dans les pillages, avant de citer parmi les "causes complexes" la désagrégation de l'autorité parentale, l'absence de modèle, la culture de gangs et le mauvais exemple des banquiers "cupides et égoïstes".

Surtout, il a sèchement repoussé les arguments de ceux de ses lieutenants qui mettaient en avant la responsabilité des coupes dans les budgets sociaux ou même l'augmentation des droits de scolarité à l'université. Et pour cause ! Les coupes ne sont pas encore intervenues, et les violences ont généralement été l'oeuvre d'adolescents qui ont décroché du système scolaire dès le secondaire. Le résultat ? Quand le chômage frappe 20 % des Blancs de leur âge, 1 jeune Noir sur 2 est sans emploi. Et ils ont huit fois plus de chances d'être arrêtés par la police. "Beaucoup sont dépourvus d'infrastructure mentale, résume Emily Shenton, d'Arrival Education, une organisation d'insertion de jeunes en difficulté. Ils ne sont pas capables de penser à l'avenir ni de saisir l'occasion au vol." Au pouvoir entre 1997 et 2010, les travaillistes avaient échoué à intégrer ce sous-prolétariat, proprement inemployable ; les conservateurs sont aujourd'hui tout aussi démunis face à leur violence et à leur tranquille amoralité.

http://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/emeutes-au-royaume-uni-un-gout-de-cendres_1021027.html

Aucun commentaire: