INFO LE FIGARO - Selon un rapport d'Europol, elle réalise plus de la moitié des interpellations d'islamistes radicaux dans l'Union.
La France a réalisé à elle seule plus de la moitié des arrestations d'islamistes radicaux en Europe en 2010: 94 interpellations sur 179 au total. Ce qui en fait, en quelque sorte, le premier rempart contre cette menace sur le territoire de l'Union. Le dernier rapport annuel de l'office européen de police Europol mettra du baume au cœur des agents des services français antiterroristes qui œuvrent en coulisse pour déjouer les complots criminels des mouvements salafistes se revendiquant d'al-Qaida.
Le criminologue Alain Bauer en déduit que «la méthode préventive à la française paie» et que «la réforme des services de renseignement, notamment la création de la DCRI, qui a fusionné RG et DST, témoigne là de sa pertinence, l'Hexagone ayant été préservé, l'an dernier, de la moindre attaque interne». Le préfet Bernard Squarcini, chef de la DCRI (Direction centrale du renseignement intérieur), indique, pour sa part, au Figaro que «depuis quelques mois, à la demande du chef de l'État, la France a relevé son niveau de riposte et son format de veille». En clair: «Comme il n'y a plus de différence entre les menaces intérieures et extérieures aujourd'hui, l'antiterrorisme a engagé une réforme de coopération majeure entre ses services de renseignements intérieurs et la Direction générale des services extérieurs (DGSE)», précise-t-il. Cette récente «mutualisation» a permis, poursuit-il, d'être «plus performant en termes de neutralisation préventive».
Mais la vigilance reste de mise. À en croire le rapport du directeur d'Europol, Rob Wainwright, «les groupes terroristes islamistes continuent à planifier des attaques contre les États membres», à l'instar de celles commises l'an dernier au Danemark et en Suède. Ils sont aussi, dit-il, «en train de changer dans leur composition et leur leadership», les réseaux devenant «multinationaux», «leur commandement se faisant de moins en moins depuis un pays extérieur à l'Union», tandis que les individus susceptibles d'agir sont souvent des «acteurs isolés ».
Autre tendance relevée par les experts d'Europol: «Les connexions croissantes entre terrorisme et crime organisé.» Pour Alain Bauer, «elles se manifestent surtout sous forme de financement des réseaux via les trafics de drogue, d'armes, d'être humains constatés notamment dans la zone sahélienne», qui concentre toute l'attention des services, tant il est vrai qu'al-Qaida pour le Maghreb islamiste (Aqmi) y a étendu son influence. Le terrorisme et le crime auraient donc partie mêlée, ce qui n'est pas totalement nouveau pour la France. La chute du réseau Chalabi, au temps de Charles Pasqua, avait déjà révélé des passerelles avec le banditisme.
L'agence européenne de police constate également que «le retour de djihadistes des zones de conflits (tels l'Afghanistan, le Pakistan ou le Yémen) continue de constituer une menace en Europe». Elle cite ainsi l'exemple du démantèlement en mai dernier en France d'un réseau de soutien logistique et de recrutement de moudjahidins, qui avait envoyé neuf Français et Tunisiens sur le front pakistano-afghan entre juillet 2008 et avril 2009. Ils étaient « susceptibles de » passer à l'action une fois revenus en Europe, assure les rédacteurs du rapport. Selon eux, ils étaient en possession de «manuels pour apprendre à éviter d'être détectés par les forces de l'ordre et les services de renseignements». Le petit guide du parfait clandestin.
Dans cette action de recrutement et de prosélytisme, le rôle d'Internet est devenu fondamental, souligne les agents d'Europol, qui ont comptabilisé une vingtaine de forums très actifs sur la Toile. Selon eux, «les administrateurs des sites s'échangent même des instructions sur les procédures à suivre en cas d'arrestation». Preuve que les réseaux s'adaptent et se perfectionnent.
L'agence n'hésite pas non plus à écrire que depuis les révolutions arabes «le flot des migrants d'Afrique du Nord peut avoir une influence sur la sécurité des États de l'Union». Et d'enfoncer le clou: «Il est devenu plus facile pour des terroristes de pénétrer isolément sur le sol européen, au milieu de la masse des migrants.» Le préfet Squarcini le dit: «Nous sommes plus que jamais dans l'anticipation.»
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